Le calcium est sans doute l’une des substances les plus importantes pour le corps. Il assure plusieurs rôles aussi cruciaux les uns que les autres dans l’organisme. Ainsi, son absence entraîne sans doute des conséquences désastreuses. Toutefois, lorsqu’il est en excès, cela peut aussi s’avérer dangereux. La quantité de calcium dans le sang est appelée la calcémie. On parle d’hypercalcémie lorsque cette quantité est supérieure à la normale. Quelles sont les causes possibles d’une hypercalcémie et comment la traiter ?
Sommaire de l'article
L’hypercalcémie : en quoi ça consiste ?
Le calcium présent dans l’organisme se retrouve majoritairement au niveau des os. Il est réparti dans l’organisme selon certaines proportions bien fixes. Lorsque la concentration sérique habituelle du calcium subit des modifications, cela entraîne des conséquences. Ces conséquences peuvent être chroniques ou aigues.
Répartition du calcium dans l’organisme
Le calcium est réparti à trois endroits différents au niveau de l’organisme. Il s’agit des os, du fluide intracellulaire et du fluide extracellulaire. Les os prennent bien sûr, la quasi-totalité du calcium. À ce titre, 99% du calcium présent dans l’organisme se retrouve au niveau des os. Chez un sujet lambda faisant un poids de 70kg, le nombre de mol au niveau des os est d’environ 31,4×103. Ce qui représente environ 1255×103milligrammes.
Au niveau du fluide extracellulaire, chez le même sujet, on remarque que la concentration en calcium est de 2,4 mmol/L. Cette proportion représente moins de 1% de la quantité totale de calcium présent dans le corps. Dans le fluide extracellulaire, on a 35 mol de calcium représentant environ 1400 milligrammes.
Enfin, au niveau du fluide intracellulaire, toujours chez le sujet de 70kg, voici les proportions. On a une concentration de 0,1 µmol/L, ce qui représente moins de 1 mol pour une masse inférieure à 40 milligrammes.
En général, la quantité totale de calcium dans l’organisme est de 31,5×103mol. Sur cette quantité totale, les os prennent à eux seuls environ 31,4×103 mol, le fluide extracellulaire 35 mol et le fluide intracellulaire moins de 1 mol.
Les nuances caractérisant l’hypercalcémie
L’hypercalcémie est un problème clinique qui affecte de nombreuses personnes. Cependant, dans bien des cas, l’hypercalcémie peut être trompeuse. Il existe en effet une hypercalcémie fausse.
Quand on parle d’hypercalcémie, cela se caractérise principalement par l’augmentation de la quantité de calcium ionisé. Dans les cas où l’hypercalcémie est fausse, c’est plutôt la fraction de calcium lié aux protéines qui croît. De nombreuses études menées dans ce sens ont réussi à montrer que, près de 40 à 45% du calcium est lié à des protéines. L’une de ces principales protéines est l’albumine.
L’hyperalbuminémie qui est l’augmentation de cette protéine dans l’organisme, entraîne inéluctablement l’augmentation de calcium total. Toutefois, dans ce cas, ce n’est pas le calcium ionisé qui augmente, mais plutôt le calcium lié à l’albumine. À cet effet, pour réaliser le dosage de calcium dans l’organisme, il faut procéder au dosage du calcium ionisé et de celui d’albumine.
On parle d’hypercalcémie totale, lorsque la concentration plasmatique de calcium est supérieure à 2,55 mmol/L. Une hypercalcémie ionisée par contre, est caractérisée par une concentration de 1,3 mmol/L. Lorsque le patient diagnostiqué est atteint d’hyperalbuminémie, on procède au calcul de la calcémie corrigée. Cette dernière est en effet, la calcémie qu’aurait eue le patient s’il ne souffrait pas d’hyperalbuminémie.
Les symptômes de l’hypercalcémie
L’hypercalcémie s’exprime par de nombreux symptômes. Ceux-ci varient en fonction du niveau de gravité de l’hypercalcémie et de sa vitesse de développement. Nonobstant cette diversité de symptômes existants, l’hypercalcémie peut être asymptomatique dans près de 10% des cas. Les symptômes peuvent consister en des troubles digestifs et en des troubles psychiques, lorsqu’on est en présence d’hypercalcémie aiguë.
Afin de mieux cerner les symptômes de l’hypercalcémie, il convient de s’intéresser d’abord aux différents types d’hypercalcémie existants. En effet, chaque type d’hypercalcémie a ses propres symptômes.
Les différents types d’hypercalcémie et leurs symptômes
Il existe deux principaux types d’hypercalcémie. L’hypercalcémie aiguë et l’hypercalcémie chronique.
L’hypercalcémie aiguë
Il s’agit de la première forme d’hypercalcémie existante. L’hypercalcémie est dite aiguë, lorsqu’elle est causée par un déséquilibre accéléré entre les flux calciques entrant et sortant de l’espace extracellulaire. Les flux se produisent principalement à trois endroits. D’abord au niveau de l’intestin, ensuite au niveau de l’os, soit par résorption ou accrétion. Le rein est enfin le dernier endroit où se produit régulièrement un flux. Il est capital que le calcium soit sous forme ionisée dans ces cas.
Les symptômes de l’hypercalcémie aiguë sont nombreux, mais peuvent être regroupés en 4 principaux groupes. Il s’agit notamment de troubles digestifs, de troubles neuropsychiques, de troubles cardio-vasculaires, et de déshydratation rénale.
Les troubles digestifs
Les troubles digestifs interviennent lorsque la calcémie dépasse un certain seuil, en l’occurrence celui de 3mmol/L. Ceux qui sont fréquemment observés dans ce cas sont :
- L’anorexie ;
- La nausée ;
- Les vomissements.
En dehors de ces troubles digestifs, d’autres, moins fréquents, peuvent aussi intervenir. Il s’agit principalement de la pancréatite aiguë, engendrée par un mécanisme qui fait encore l’objet d’études.
Les troubles neuropsychiques
À l’inverse des troubles digestifs qui sont déclenchés à partir de certaines conditions fixes, les troubles neuropsychiques accompagnent automatiquement l’hypercalcémie aiguë. Parmi les troubles visés ici, certains sont fréquents et d’autres le sont moins. Les troubles les plus fréquemment observés sont : l’asthénie, les troubles de l’humeur et les déficits cognitifs.
L’asthénie est un état de fatigue généralisée du corps, qui atteint le physique et le mental. Quant aux troubles de l’humeur causés par l’hypercalcémie, ils sont peu spécifiques, c’est-à-dire qu’ils s’apparentent aux symptômes d’autres maladies.
Parlant des troubles neuropsychiques moins fréquents, ils interviennent principalement lorsque l’hypercalcémie est sévère. Ces troubles consistent en des épisodes d’hallucination, de confusion et des épisodes psychotiques. Lorsque la maladie atteint une phase très critique, elle peut déboucher sur un coma.
Les troubles cardio-vasculaires aigus
Ici, les principaux troubles concernés sont l’hypertension artérielle et la diminution de l’espace QT. Ces troubles peuvent être plus ou moins graves. Cependant, en cas de gravité, ils sont le plus souvent associés à d’autres pathologies ou au mode de vie.
La déshydratation rénale
La polyurie-polydipsie est responsable de cette déshydratation. Il s’agit d’une résistance développée face à l’action de l’ADH, qui assure une fonction capitale dans le fonctionnement rénal. Lorsque l’hypercalcémie s’installe chez un individu, elle entraîne la diminution de la réabsorption tubulaire de sodium. Cette diminution entraîne la déshydratation cellulaire, et impacte le traitement de calcium dans l’organisme.
La diminution, lorsqu’elle dure dans le temps, peut aussi créer à la longue, une insuffisance rénale aiguë. Ce qui favorise encore plus la mauvaise répartition de calcium dans le corps et entraîne une aggravation de l’hypercalcémie. Un cycle vicieux s’installe alors.
L’hypercalcémie chronique
L’hypercalcémie est dite chronique, lorsque son installation n’a pas été rapide et quand elle présente des symptômes moins graves. Cette forme d’hypercalcémie se manifeste par trois symptômes principaux. En tête de liste se retrouve la lithiase rénale. Elle résulte bien souvent d’une hyperparathyroïdie primaire ainsi que d’une hypercalcémie prolongée.
En deuxième position, se trouve l’insuffisance rénale chronique. Cette dernière se manifeste par des dépôts tubulaires et interstitiels de calcium, résultant d’une hypercalciurie prolongée. Enfin, l’hypercalcémie chronique se manifeste par des troubles cardio-vasculaires. Ces troubles sont la conséquence des dépôts de calcium dans les artères coronaires, les valves ainsi que les fibres du myocarde.
Les causes de l’hypercalcémie
L’hypercalcémie peut être occasionnée par de nombreux moyens. La principale cause de cette maladie est l’hyperthyroïdie primaire, les autres causes, non moins importantes, sont moins fréquentes.
Hyperparathyroïdie primaire
L’hyperparathyroïdie primaire est une pathologie qui consiste en une augmentation primitive de la sécrétion de PTH. Cette surproduction de PTH entraîne des conséquences comme l’hypercalcémie, une hypophosphatémie et une hypercalcitriolémie. À ces conséquences s’ajoute l’hypercalciurie, en dépit de l’effet hypocalciuriant de la PTH sur le tubule. Cette dernière pathologie a pour origine l’hyperrésorption osseuse ainsi que l’hyperabsorption digestive de calcium.
Dans près de 80% des cas, l’hyperparathyroïdie primaire est le résultat d’un adénome simple. Il peut arriver cependant dans 15% des cas, qu’on soit en présence d’une hyperplasie des quatre glandes. Dans certains cas rares et extrêmes, on peut assister à un carcinome parathyroïdien, une forme aggravée de l’hyperparathyroïdie primaire. Ce cas exceptionnel engendre une hypercalcémie particulièrement sévère et très mal tolérée.
L’adénome parathyroïdien est une pathologie qui touche majoritairement les femmes à partir de l’âge de 40 ans. Dans la plupart des cas, elle est asymptomatique. Cependant, elle peut se révéler par des signes comme la lithiase urinaire, des douleurs osseuses, et la chondrocalcinose. Cette pathologie résulte d’une surconsommation de lithium. Il convient de préciser que l’hypercalcémie causée ici est relativement modérée.
Il existe d’autres types d’hyperparathyroïdie, notamment celles tertiaire et secondaire. L’hyperparathyroïdie tertiaire est une forme aggravée de l’insuffisance rénale chronique. Elle résulte d’une hyperparathyroïdie secondaire non traitée sur une longue durée. Elle se développe d’abord par hyperplasie, puis par l’autonomisation des glandes parathyroïdiennes. L’hyperparathyroïdie secondaire quant à elle, est une variante de l’hyperparathyroïdie primaire. Elle ne déclenche pas d’hypercalcémie.
Les origines osseuses de l’hypercalcémie
L’hypercalcémie peut provenir d’un dysfonctionnement au niveau des os. Dans ces cas, elle résulte d’une hyperésorption osseuse, caractérisée par une calciurie élevée et une PTH basse. Les origines osseuses de l’hypercalcémie peuvent être sous plusieurs formes. Il peut être question d’affections malignes telles que le cancer et l’hémopathie. D’autres pathologies peuvent aussi être concernées.
Le cancer et l’hémopathie
En dehors de l’hyperparathyroïdie primaire, les cancers et l’hémopathie constituent les causes les plus fréquentes de l’hypercalcémie. Lorsque l’hypercalcémie résulte de l’une de ces maladies, elle s’installe très rapidement, ce qui la rend plus grave. De façon générale, les anomalies osseuses sont toujours impliquées dans le déclenchement d’une hypercalcémie avec une forte hypercalciurie.
Dans le cas du cancer qui est caractérisé par la formation de tumeur, il peut engendrer une hypercalcémie dans bien des cas. Les cancers à l’origine d’une hypercalcémie sont donc ceux du sein, de la thyroïde, du rein, du poumon et des testicules. En ce qui concerne l’hémopathie, il s’agit généralement des pathologies comme :
- La leucémie ;
- Le myélome multiple ;
- Le lymphome.
L’hypercalcémie est engendrée par l’augmentation de la résorption osseuse. Par conséquent, plus cette résorption est importante, plus l’hypercalcémie est grave. La résorption osseuse se fait par un mécanisme local ou systémique.
Les autres pathologies osseuses à l’origine d’une hypercalcémie
Il s’agit en premier lieu de l’hypervitaminose A. Cette pathologie s’explique par l’augmentation d’UI par jour. Lorsque cet accroissement ne connaît pas de freins et que la quantité d’UI dépasse 10.000 par jour, il peut en résulter une augmentation de la résorption osseuse. En second lieu, on trouve l’hyperthyroïdie qui peut aussi être à la base d’une augmentation de la résorption osseuse.
Néanmoins, dans le cas présent, la résorption osseuse provoquée n’est pas souvent assez forte pour causer une hypercalcémie. Par conséquent, cette pathologie peut déclencher une hypercalcémie dans seulement 15 à 20% des cas. En dernière position, on a l’immobilisation prolongée. En effet, en absence d’efforts mécaniques sur une longue durée, la résorption osseuse augmente fortement. Ce qui peut bien souvent occasionner une hypercalcémie.
L’hypervitaminose D
L’hypercalcémie est en lien avec l’hypercalcitriolémie. Cette dernière est une maladie qui se traduit par une augmentation de l’absorption digestive de calcium. Elle est caractérisée par une calciurie élevée et une PTH basse. Cette augmentation de l’absorption intestinale peut aussi être induite par une hypervitaminose D. Il s’agit d’une pathologie causée principalement par l’administration de substances comme :
- Calcitriol ;
- Vitamines D2 ou D3 naturelles ;
- Vitamine D3 25-hydroxylé.
Dans ce type d’hypercalcémie, le calcitriol joue un rôle clé. Son blocage peut donc mettre un terme à l’hypercalcémie, en à peine 2 jours. Lorsque ce sont plutôt les vitamines D naturelles qui sont responsables de l’hypercalcémie, il faut un peu plus de temps pour le traitement.
Les autres causes de l’hypercalcémie
Il s’agit d’abord des causes diurétiques thiazidiques. Elles sont caractérisées par une diminution de la calciurie qui se fait à travers la réabsorption du calcium par le tube contourné proximal. Cette pathologie intervient généralement, en réponse à une hypovolémie. Cette propriété s’utilise chez les individus lithiasiques et hypercalciuriques. L’hypercalcémie intervient ici en présence d’une maladie sous-jacente.
Ensuite, il y a la prise excessive de calcium. La consommation régulière des aliments riches en calcium tels que le lait et les fruits de mer en est la cause. En présence d’un rein défaillant, l’énorme quantité de calcium envoyée dans l’organisme n’est pas traitée convenablement. Les résidus sont donc absorbés par le sang. La dernière cause de l’hypercalcémie est la présence excessive d’acromégalie. Cette hormone entraîne une augmentation de la production de calcitriol.
Comment traiter l’hypercalcémie
Le principe de traitement de l’hypercalcémie est de commencer par abaisser la calcémie et de continuer avec un traitement étiologique.
Traitement de l’hypercalcémie aiguë
Ce traitement peut se faire de plusieurs manières, mais l’objectif reste le même : diminuer la calcémie.
La première méthode utilisée ici est la perfusion de solution isotonique salée. Cette perfusion permettra dans un premier temps, de remédier à la déshydratation extracellulaire. Elle permettra ensuite de diminuer la calcémie, en formant un barrage contre le mécanisme de l’hypercalcémie.
Le second traitement intervenant est la diurèse forcée par fusoméride. Toutefois, avant d’y avoir recours, il faut s’assurer que la déshydratation extracellulaire a été corrigée et que les pertes urinaires seront bien compensées. Ce traitement est de moins en moins recommandé de nos jours. Cela s’explique par ses nombreuses contraintes et par ses contre-indications, dont le myélome.
Un autre traitement est l’antiostéoclastie par biphosphonates. Ce traitement vise à inhiber la résorption osseuse. Elle se montre très efficace, en ce sens que l’hypercalcémie est majoritairement impactée par la forte résorption osseuse. La durée d’action de ce type de traitement peut varier, de quelques jours à des semaines entières.
L’administration de calcitonine peut aussi être listée au rang des traitements. Cependant, ce traitement n’est plus d’actualité, car son effet est éphémère, voire transitoire.
Les glucocorticoïdes peuvent également intervenir dans le traitement de l’hypercalcémie. Ces substances permettent de réduire l’absorption digestive du calcium. Ce traitement est spécifique aux hypercalcémies provoquées par myélome et hémopathie.
La dialyse peut aussi être une alternative en cas d’hypercalcémie. Cette technique consiste à réaliser un bain dialysé pauvre en calcium. Elle est particulièrement appréciée en raison de sa rapidité d’action.
Lorsque l’hypercalcémie est causée par un carcinome parathyroïdien, il faut appliquer directement un traitement calcimimétique.
Le traitement étiologique
Ce traitement intervient pour supprimer la cause de l’hypercalcémie. Il consiste donc à s’attaquer directement à la cause de la maladie.
Traitement de l’hyperparathyroïdie primaire
Pour endiguer ce mal, on peut recourir à la chirurgie dans certains cas comme :
- Patient âgé de plus de 50 ans ;
- Hypercalcémie supérieure à 2,75 mmol/L ;
- Calciurie supérieure à 10mmol/24H ;
- Insuffisance rénale causée par hyperparathyroïdie primaire ;
- Atteinte osseuse.
En ce qui concerne les patients inaptes à subir une opération, d’autres alternatives ont été développées. Il s’agit de l’administration combinée ou non de cinacalcet et de biphosphonates. Le cinacalcet permet de réduire la calcémie en inhibant les récepteurs de calcium. Le biphosphonate permet d’agir contre l’atteinte osseuse.
Traitement de la sarcoïdose
Dans le cas présent, l’hypercalcémie est le seul symptôme observé pour la maladie responsable. On procède dans ces cas à une corticothérapie. Ce traitement est efficace, aussi bien sur l’hypercalcémie que sur l’hypercalciurie. En effet, en l’appliquant, il faut entre 3 et 5 jours pour constater la disparition totale de l’hypercalcémie. Pour ce qui est de l’hypercalciurie, il faut attendre environ 7 à 10 jours. Si après guérison, on constate une récidive, le traitement peut être repris afin d’y remédier définitivement.